Danse
CONTORSIONS

Kô Murobushi - Japon

24 Nov. ► 25 Nov. 2010

© Junichi Yamauchi

Kô Murobushi compte parmi les continuateurs obstinés de la danse butô. Figure internationale de premier plan, il a choisi Angers pour créer sa nouvelle pièce en trio.

Depuis des années Kô Murobushi fréquente discrètement Angers. Il y dispense son enseignement auprès des étudiants du CNDC. Il y crée à présent une nouvelle pièce, mûrie longuement à destination de trois interprètes japonais. Fréquenter l'art de Kô Murobushi fait remonter aux sources d'un courant qui a bouleversé l'art chorégraphique du XXe siècle sur la planète. Dès les années 60, il reçoit l'influence directe d'Hijikata, fondateur de la danse des ténèbres qui tourmenta à jamais la conscience des corps. Au côté d'Amagatsu, devenu ensuite le fameux inspirateur de Sankai Juku, il fonde le collectif Dairakudakan, l'un des plus incisifs dans cette nouvelle esthétique. Mais fréquenter l'art de Kô Murobushi, c'est aussi le dépouiller de clichés auquel il est souvent réduit. Ici nul exotisme, ni langueur esthétisante, mais une claire conscience de la part que le butô doit à ses frottements avec la modernité occidentale. Ce continuateur solitaire, obstiné, frappe par l'intensité, la violence presque, de son engagement physique ondulant dans l'espace, comme par la distance et l'indépendance, parfois teintées d'humour, qu'il cultive avant tout à travers une danse née pour repousser les limites du pensable des corps.

Kô Murobushi

La danse de Kô Murobushi est en filiation directe avec celle de Tatsumi Hijikata, fondateur du butô, dont il fut l'élève. Créateur de plusieurs troupes de butô, notamment Dairakudakan, Ariadone, Sebi et récemment Kô & Edge Co (2003), Kô Murobushi se présente comme l'un des représentants les plus radicaux de cette danse. Ses pièces parcourent le monde. Inspiré par la littérature comme par l'animisme, son travail réagit à une société en balance entre l'immuable de la tradition et le nouvel âge de la haute technologie, tout en restant fidèle à la conception d'Hijikata qui parle de " révolte de la chair ". En 2006, il a présenté au CNDC son solo Quick Silver.

Kô Murobushi à l'École supérieure du CNDC / Formation d'artiste chorégraphique
Ouverture studio de l'École supérieure du CNDC / soli butô le lundi 18 octobre à 19:00 aux studios CNDC Bodinier, entrée libre sur réservation au 02 44 01 22 66 Après plusieurs expériences pédagogiques et créatrices fructueuses à l'école supérieure du CNDC en 2006 et en 2008, Kô Murobushi est de nouveau invité cette année. Il fera partager à la nouvelle promotion sa vision radicale de la danse et ses techniques de travail, en vue de la création originale, en fin de session, d'un solo par chaque danseur. Les ateliers de Kô Murobushi consistent en une mise en condition physique qui repose sur des exercices respiratoires, des assouplissements, une sollicitation constante des capacités sensorielles des danseurs, suivis de séquences d'improvisation dont les consignes stimulent leur créativité (‚ ).
Si les ateliers reposent sur la riche tradition du butô (références aux spectacles et aux écrits de Hijikata, techniques et exercices " canoniques ") et sur la façon très personnelle dont Kô Murobushi se l'approprie et l'infléchit, ils ne se proposent pas de pousser les danseurs à la création de solos de butô à proprement parler. Cette plongée dans l'univers du butô permet surtout d'enrichir la palette sensorielle, gestuelle, émotionnelle et imaginaire des danseurs pour qu'ils puissent, en dernière instance, trouver dans leurs solos un style et un ton personnels. C'est ce détour par le butô qui permet paradoxalement à nombre d'entre eux d'ouvrir des portes, d'emprunter des chemins inusités pour exprimer plus pleinement leur créativité et adopter un style propre.

Basile Doganis