Persona
mercredi 4 mars à 20:00
durée : 1H30 environ
© Bastien Burger
Le spleen et la nonchalance de Bertrand Belin cachent difficilement la boulimie créative de l’artiste protéiforme. Romancier, musicien, chanteur, il distille méticuleusement sa poésie singulière d’une voix suave et profonde.
Commençons par une évidence, oui, la voix de Bertrand Belin n’est pas sans rappeler le timbre si particulier d’Alain Bashung, cette façon singulière de faire résonner chaque syllabe, de donner aux mots un accent d’imaginaire américain. Ils partagent cette poésie si incarnée qu’elle s’épanouit et s’impose sur des registres instrumentaux aux variations surprenantes.
Si la musique de Bertrand Belin s’inscrit dans un certain dépouillement, elle n’en oublie pas moins de rappeler les multiples influences de l’auteur. Avec une aisance déconcertante, il mêle des univers qui empruntent à l’indie-pop la plus exigeante. Pour autant, l’écoute est simple et fluide, cohérente de bout en bout. Une oreille distraite pourrait presque entendre s’écouler un long fleuve tranquille.
Ce serait oublier la fine plume de l’auteur qui réussissait l’exploit la même année de sortir simultanément son album Persona chez Cinq7 et le roman Grands carnivores chez P.O.L. Ses chansons décrivent avec une certaine langueur l’anonymat et la violence des grandes villes de manière pointilliste.
Les orchestrations sont à l’image du dépouillement lexical, chaque note, chaque silence va droit au but, sans effet superflu. La magie opère et nous fait glisser tantôt sur des nappes synthétiques, tantôt sur des riffs de guitare déliés sans jamais nous donner le sentiment de nous perdre dans une surenchère de genres. Étrangement, et ce malgré la variété des influences, nous glissons dans ces saynètes contemporaines, blottis dans les doux trémolos graves de sa voix.